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Appréciation de la renonciation à l’exercice de l’action résolutoire : illustration

Civil - Contrat
26/07/2016
Dès lors que l’acte de vente prévoit un paiement du prix au fur et à mesure de l’avancement des travaux, il ne peut être déduit de la délivrance des lots antérieurement au paiement intégral du prix d’achat et de la non-inscription du privilège une renonciation non équivoque du vendeur à exercer l’action résolutoire en cas de non-paiement du prix.
Une société vend à sa gérante, plusieurs lots de copropriété en l’état futur d’achèvement dans un immeuble en cours de rénovation. Plusieurs années après la mise à disposition des locaux, la société venderesse, représentée par son gérant actuel, assigne l’ancienne gérante en résolution de la vente et paiement de dommages-intérêts, soutenant que cette dernière occupait un appartement et en louait d’autres sans avoir réglé la totalité du prix. La cour d’appel fait droit à sa demande et prononce la résolution de la vente, jugeant qu’il ne pouvait être déduit de la non-inscription du privilège de la venderesse et de l’entrée en possession des lots cédés malgré le non-paiement du prix la renonciation à l’exercice de l’action résolutoire, et refusant d’exclure de l’assiette de la résolution de la vente certains lots. En outre, les magistrats du second degré condamnent l’ancienne gérante à verser à la venderesse une certaine somme au titre de la dépréciation des biens objets de la vente résolue.

La défenderesse forme un pourvoi en cassation. Elle soutient, notamment, que les juges d’appel n’ont pas recherché si la conjugaison de l’ensemble des actes  qu’elle alléguait manifestaient sans équivoque la volonté de sa cocontractante de renoncer à l’exercice de l’action résolutoire et, en tout état de cause, auraient dû rechercher si les prestations objets du contrat de vente étaient divisibles de manière à prononcer, le cas échéant, la résolution seulement partielle de la vente.

La Cour de cassation rejette ce premier moyen : « (…) ayant relevé (…) que l’acte de vente stipulait que le prix serait payé au fur et à mesure de l’avancement des travaux et précisait les garanties de paiement, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a pu considérer qu’il ne pouvait être déduit de la délivrance des lots antérieurement au paiement intégral du prix d’achat et de la non-inscription du privilège une renonciation non équivoque de la venderesse à exercer l’action résolutoire en cas de non-paiement du prix ; (…) ayant retenu que l’acte de vente ne portait mention que d’un prix global, non ventilé entre les divers lots objets de la cession, la cour d’appel (…) a légalement justifié sa décision ».

La Haute juridiction censure en revanche la cour d’appel sur le fondement d'un autre moyen. Elle rappelle en effet, au visa de l’article 1184 du Code civil, que « le vendeur n’est pas fondé, en raison de l’effet rétroactif de la résolution de la vente, à obtenir une indemnité liée à l’utilisation de la chose vendue ou à l’usure résultant de cette utilisation ». Aussi, les juges d’appel ne pouvaient condamner l’ancienne gérante à indemniser la société venderesse de la dépréciation des biens vendus intervenue entre leur vente et leur restitution.
 
Source : Actualités du droit