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Domanialité publique : la délibération approuvant une cession est un acte créateur de droits

Public - Droit public général
Civil - Immobilier
16/09/2020
Dans une décision rendue le 29 juillet, la Haute cour a déclaré qu’une délibération d’un conseil municipal autorisant, décidant ou approuvant le transfert de propriété de biens immobiliers relevant de son domaine public constituait un acte créateur de droits. Ainsi, une commune ne peut se rétracter en adoptant une nouvelle délibération approuvant une mise à disposition en remplacement de la cession.
La commune de Chevreuse avait mis à disposition du syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de la région de Chevreuse un terrain en vue de la construction d’équipements sportifs il y a une cinquantaine d’année.
 
En 2012, le conseil municipal avait approuvé la cession au SIVOM des parcelles, à charge que l’affectation actuelle, c’est-à-dire l’exploitation d’équipements sportifs, soit une affectation au service public, ne soit pas modifiée.
 
Toutefois, après avoir pris connaissance de la valeur vénale du terrain, le conseil municipal avait décidé par délibération la poursuite de la mise à disposition du terrain, et autorisé le maire à signer une convention de mise à disposition.
 
Le SIVOM avait alors saisi le tribunal administratif de Versailles et obtenu l’annulation de la délibération décidant de la poursuite de la mise à disposition ainsi qu’une injonction au maire d’assurer l’exécution de la première délibération, qui approuvait la cession des parcelles. Ce jugement ayant été annulé par la cour administrative d’appel de Versailles, le SIVOM se pourvoit en cassation.
 
Le Conseil d’État, dans sa décision du 29 juillet (CE, 29 juill. 2020, n° 427738), fait droit à la demande du SIVOM en annulant l’arrêt d’appel. Il rappelle les termes de l’article L. 3112-1 du code général de la propriété des personnes publiques, selon lequel « Les biens des personnes publiques mentionnées à l'article L. 1, qui relèvent de leur domaine public, peuvent être cédés à l'amiable, sans déclassement préalable, entre ces personnes publiques, lorsqu'ils sont destinés à l'exercice des compétences de la personne publique qui les acquiert et relèveront de son domaine public ».
 
Il en découle selon la Haute cour que « la délibération du conseil municipal d’une commune autorisant, décidant ou approuvant le transfert de propriété de biens immobiliers relevant de son domaine public au profit d’une autre personne publique, […] constitue un acte créateur de droits dès lors que les parties ont marqué leur accord sur l’objet et les conditions financières de l’opération et que la réalisation du transfert de propriété n’est soumise à aucune condition ».
 
Ainsi, les juges d’appel, en considérant que seul « l’acte en la forme administrative ou l’acte notarié » était créateur de droit, a commis une erreur de droit. La délibération par laquelle le conseil municipal avait approuvé la cession des parcelles au SIVOM constituait bien un acte créateur de droits au profit de ce dernier.
 
L'article L. 2241-1 du code général des collectivités territoriales prévoit que « le conseil municipal délibère sur la gestion des biens et les opérations immobilières effectuées par la commune. […] Toute cession d'immeubles ou de droits réels immobiliers par une commune de plus de 2 000 habitants donne lieu à délibération motivée du conseil municipal portant sur les conditions de la vente et ses caractéristiques essentielles ». Le maire est ensuite chargé de l’exécution de la décision.
 
Le Conseil d’État avait déjà déclaré que la délibération du conseil municipal décidant d’une cession, sans la subordonner à une condition, valait vente parfaite au sens de l’article 1583 du code civil (CE, 15 mars 2017, n° 393407). Cet article prévoit en effet que la vente « est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé ».
 
C’est donc dans cette logique que la Haute cour a annulé l’arrêt d’appel, les juges ayant considéré que la décision du conseil municipal de céder les terrains au SIVOM ne constituait pas une vente et que le conseil était libre d’adopter une nouvelle délibération décidant finalement de poursuivre la mise à disposition des terrains.
 
Pour en savoir plus sur la cession du domaine public des collectivités, voir Le Lamy Droit public des affaires n° 4179 et s.
Source : Actualités du droit